A la découverte du parc de Sceaux sur les traces de Colbert, Le Nôtre et la duchesse du Maine

Que cache ce poumon vert de 181 hectares à 20 minutes de RER au sud de Paris ? Un château bien sûr (il y en a même deux), mais aussi des pavillons, une orangerie, un grand canal, des cascades, bassins, fontaines et jets d’eau, de superbes et immenses perspectives, des statues et sculptures, des sous-bois, de petits jardins d’ornement à la géométrie parfaite, des bosquets de cerisiers en fleurs et autres arbres remarquables, des prairies champêtres et pâturages où broutent vaches et moutons, deux musées, des lieux de mémoire, un théâtre de Guignol… Alors que le domaine retrouve petit à petit sa splendeur du Grand Siècle au temps de Colbert et de Le Nôtre, mais aussi de la glorieuse époque des Grandes Nuits de Sceaux à la cour de la duchesse du Maine le siècle suivant, partons explorer ce joyau vert de l’Ile-de-France, qui se découvre et redécouvre au fil des saisons.

© Nicolas Pelé – Les parterres de broderies ont été restaurés en 2013 à l’occasion du 400ème anniversaire de la naissance d’André Le Nôtre.

Aujourd’hui, le parc de Sceaux et ses monuments constituent l’un des ensembles les mieux préservés du Grand Siècle de Louis XIV. Labellisé « Jardin remarquable », le parc a également reçu le label « Eve » : espace vert écologique. Un parcours sportif de 3,2 km fait le tour du domaine. Ce parc est l’œuvre excusez du peu de l’illustre André Le Nôtre, le génial créateur des jardins de Versailles, mais aussi de Chantilly, Vaux-le-Vicomte, Saint-Cloud, Saint-Germain-en-Laye… C’est lui qui fait creuser le Grand Canal long de 1 140 mètres ! On lui doit aussi les cascades (refaites dans les années 1930 puis rénovées en 2022) et le bassin de l’Octogone.

Commençons la visite du domaine départemental de Sceaux par l’Allée d’Honneur qui mène à l’entrée principale, comme le fit Louis XIV lorsqu’il se rendit au château de Sceaux à l’invitation de Colbert en 1677. Il s’agit de ne pas commettre la même erreur que Nicolas Fouquet, qui rendit fou de jalousie le Roi-Soleil avec la splendeur de son château de Vaux-le-Vicomte. Le puissant surintendant des finances finit en prison, avec l’aide de Colbert justement, qui prit sa place, en tant que super ministre qui s’occupe de toutes les affaires du royaume : commerce, économie, marine, culture. Il ne laissa guère que la guerre à son rival Louvois. Il s’agît de faire honneur au roi avec faste mais pas trop non plus, afin de ne pas lui faire ombrage : il faut trouver le bon équilibre, ce que réussit très bien Colbert.

© Nicolas Pelé – La grille d’entrée, encadrée de deux sculptures d’animaux attribuées au sculpteur Antoine Coysevox. Il s’agit de copies, les originaux sont exposés dans l’Orangerie.

La grille d’honneur, classée monument historique

La grille d’entrée du parc est l’un des rares endroits du domaine demeurés intact depuis l’époque de Colbert, avec le Pavillon de l’Aurore, les douves sèches traversées par un pont, les écuries avec leur très bel abreuvoir et bain à chevaux, et le Petit Château, où logeaient les hôtes de Colbert, puis plus tard les enfants de la duchesse du Maine. Sans oublier le mur qui délimitait le domaine du parc de Colbert, que l’on peut toujours apercevoir aujourd’hui entre les cascades et le Grand Canal. Le portail d’honneur n’a pas changé depuis que Louis XIV le franchit pour rendre visite à Colbert en 1677.

On remarque deux superbes sculptures représentant un combat d’animaux : une licorne, symbole d’innocence et de pureté (et donc ici l’intégrité de Colbert), terrassant un dragon, et un chien, symbolisant la fidélité du super ministre au Roi-Soleil, prenant le dessus sur le loup. Restons dans l’imaginaire animalier pour s’attarder sur les armoiries de Colbert : une couleuvre. Pourquoi cet animal ? Déjà, il provient du latin coluber, qui évoque furieusement le nom de Colbert. Ensuite, il reflète bien l’état d’esprit du principal ministre de Louis XIV, qui fut contrôleur général des finances, secrétaire d’État de la Maison du roi et secrétaire d’État de la Marine.

Contrairement à Fouquet (dont la mascotte est un écureuil, animal bien présent dans le parc), il était humble, honnête et soumis au roi et un serpent inoffensif comme la couleuvre lui convenait très bien. Bref, quand d’autres puissants choisissaient comme emblème un aigle ou un lion, Colbert se contente d’une couleuvre. Il a dû en avaler plusieurs devant le Roi-Soleil…

© Nicolas Pelé – La licorne terrassant le dragon, côté ouest, à l’intérieur de la grille.
© Nicolas Pelé – La licorne terrassant le dragon, côté est, à l’extérieur de la grille.
© Nicolas Pelé – Le chien terrassant le loup, côté ouest, à l’intérieur de la grille.
© Nicolas Pelé – Le chien terrassant le loup, côté est, à l’extérieur de la grille.
© CD92/Vincent Lefebvre) – « Vue de la Maison de Sceaux appartenant à Monseigneur Colbert », en 1675. On reconnait la grille d’honneur qui n’a pas changé avec ses deux sculptures d’animaux : la licorne terrassant le dragon, à droite, et le chien terrassant le loup, à gauche, et devant, les douves sèches encadrées par les pavillons des Gardes, toujours présents de nos jours. On remarque aussi que le château était flanqué de deux ailes.
© Nicolas Pelé – A l’entrée du château, devant le portail d’honneur, se dressent encore les douves sèches qui n’ont pas changé depuis le XVIIème siècle.
© Nicolas Pelé – La clôture ancienne du château est classée monument historique, avec les deux pavillons des Gardes, le pont dormant, les fossés et les deux sculptures de Coysevox placées sur les piliers de chaque côté de la grille d’entrée.
© Nicolas Pelé – Il n’y a plus d’eau bien sûr, mais les douves ont des allures de château fort avec son pont dormant et ses murailles !

L’église Saint-Jean-Baptiste superbement rénovée

Par une belle coïncidence, l’église Saint-Jean-Baptiste, jouxtant le parc de Sceaux, porte le même prénom que son bienfaiteur, Jean-Baptiste Colbert. Construite en 1214, elle est totalement détruite par un incendie au XVIème siècle (à part quelques vestiges toujours visibles), puis reconstruite. La façade actuelle date du XVIIIème siècle. Effondré durant la Révolution, le clocher et sa flèche furent remis en place en 1853 par le duc de Trévise, qui fit édifier le château actuel trois ans plus tard.

© Nicolas Pelé – On retrouve la couleuvre, l’emblème de Colbert, sur la clef de voûte du chœur de l’église Saint-Jean Baptiste de Sceaux, superbement restaurée en 2022, qui jouxte le parc de Sceaux à son extrémité nord.

Quand Colbert acquit le domaine, le Petit Sceaux, cœur du village qui se trouvait entre l’église et l’emplacement actuel du pavillon de l’Aurore, fut rasé au profit du parc. Beaucoup d’habitants s’installèrent à l’Îlot Voltaire (actuelle place de Gaulle), 500 mètres plus à l’ouest. C’est pourquoi l’église de Sceaux n’était plus au cœur du village comme c’est de coutume, mais à son extrémité !

© Nicolas Pelé – On aperçoit au fond la superbe sculpture en marbre représentant le baptême du Christ, par saint Jean-Baptiste, qui donna son nom à l’église. Au premier plan à droite, on aperçoit en noir la plaque funéraire du duc et de la duchesse du Maine, propriétaires du domaine de Sceaux à la mort du fils de Colbert. La tombe du fils préféré de Louis XIV et de son épouse fut profanée à la Révolution et leurs restes dispersés dans une fosse commune.

Joyau de l’église Saint-Jean-Baptiste, la sculpture en marbre représentant le baptême du Christ par Saint-Jean-Baptiste fut commandée en 1680 par Jean-Baptiste Colbert au sculpteur Jean-Baptiste Tuby, voilà qui commence à faire beaucoup de Jean-Baptiste ! Sans oublier le fils de Colbert, le marquis de Seignelay, qui hérita du château et du prénom de son père ! Ce groupe de marbre ornait la chapelle du château de Sceaux, malheureusement détruite avec le reste du château durant la Révolution. Miraculeusement préservée, cette sculpture fut transférée dans l’église de Sceaux en 1804.

© Nicolas Pelé – Ce superbe tableau représentant Saint Mammès, surmonté de la châsse contenant une relique, ornait également la chapelle du château de Sceaux. C’est le duc du Maine qui demanda à l’évêque de Langres de transférer l’humérus du saint de la cathédrale de Langres à l’église Saint-Jean-Baptiste de Sceaux. Il faut dire que c’était son neveu, il ne pouvait pas lui refuser cet honneur ! L’occasion d’une fastueuse cérémonie ici même le 22 septembre 1726.
© Nicolas Pelé – Le fragment d’os est parfaitement visible dans le reliquaire.
© Nicolas Pelé – Les reliques et le tableau de Saint-Mammès s’insèrent parfaitement dans le somptueux décor de l’église Saint-Jean-Baptiste fraichement rénovée.
© Nicolas Pelé – Vitrail réalisé par Émile Hirsch représentant Saint-Mammès, martyr chrétien de Cappadoce, livré aux lions du cirque. Les fauves refusèrent de dévorer le jeune berger qui les avait apprivoisés.
© Nicolas Pelé – La base blanche des deux colonnes est tout ce qu’il reste de l’église d’origine, du XIIIème siècle, ainsi que quelques fondations bien visibles à la base extérieure du mur nord face au marché de Sceaux. Tout le reste est postérieur au grand incendie de 1530 qui détruisit l’église, mais aussi pratiquement tout le village.
© Nicolas Pelé – Façade de l’église Saint-Jean-Baptiste de Sceaux. La porte de gauche est purement décorative, juste histoire de faire une belle symétrie !

Le jardin des Félibres

© Nicolas Pelé – Le charmant petit jardin au flanc est de l’église abrite les statues de poètes provençaux : les Félibres.

Accolée à l’église Saint-Jean-Baptiste de Sceaux, le jardin des Félibres abrite un grand bassin entouré de onze statues des Félibres, les poètes provençaux, dont Florian, gentilhomme du duc de Penthièvre, et Frédéric Mistral, un des rares prix Nobel de littérature dans une langue non reconnue officiellement par l’État (« langue d’oc »). Chaque année, une cérémonie s’y déroule lors des fêtes félibréennes de Sceaux.

© Nicolas Pelé – Les bustes des hommes de lettres provençaux se reflètent dans le miroir d’eau central.
© Nicolas Pelé – Buste de Florian (1755-1794), le célèbre fabuliste originaire du Languedoc. Sa tombe était accolée à l’église, mais depuis le début des travaux en 2015, il se trouve au cimetière de Sceaux. Ses fables sont à l’origine de plusieurs expressions célèbres parmi lesquelles « pour vivre heureux, vivons cachés », « chacun son métier, les vaches seront bien gardées », ou encore « rira bien qui rira le dernier ».
© Nicolas Pelé – La tombe de Florian se trouve au cimetière de Sceaux depuis 2015.
© Nicolas Pelé – Le jardin des Félibres fait la liaison entre l’église Saint-Jean-Baptiste et le parc de Sceaux. On aperçoit au fond de l’allée le lycée Lakanal.
© Nicolas Pelé – L’église Saint-Jean-Baptiste de Sceaux est bien sûr le plus vieil édifice de la commune.

L’Orangerie qui n’a jamais été une orangerie…

Revenons à la grille d’honneur. A gauche, voici l’Orangerie construite en 1686 par Jules Hardouin-Mansart, l’architecte du roi, à l’origine entre autres de la galerie des Glaces du château de Versailles et de l’église du Dôme de l’hôtel des Invalides à Paris. Elle fut édifiée pour le marquis de Seignelay, fils aîné de Colbert, qui hérita du domaine à la mort de son père en 1683. Elle n’a pas servi à accueillir des orangers, mais fut dès l’origine une galerie d’art pour abriter les collections du marquis de Seignelay. On peut désormais y admirer de nombreuses sculptures originales (celles exposées dans le parc sont généralement des copies). Le lieu abrite régulièrement des concerts et spectacles, notamment le prestigieux Festival de musique de chambre de l’Orangerie, si bien qu’il n’est pas toujours facile d’y pénétrer, même muni du ticket du château qui en donne accès…

© Nicolas Pelé – L’Orangerie s’étire sur une centaine de mètres de long. Elle a malheureusement perdu un pavillon et deux travées, côté est, lors de la guerre de 1870-1871 contre la Prusse, détruits par un obus français… Les larges ouvertures côté sud servaient à faire rentrer le soleil.

Le bâtiment est tellement beau, que le marquis de Seignelay, grand collectionneur, préfère en faire une galerie d’art. Des tableaux de Raphaël et Lebrun ainsi que de somptueuses tapisseries ornent alors ses murs. Le marquis a d’ailleurs sa rue à Sceaux, qui reprend le tracé de l’ancienne ligne de Sceaux. La petite rue de Seignelay relie l’avenue du Président Franklin Roosevelt, qui longe le parc de Sceaux, au boulevard Colbert, réunissant le père et le fils. Colbert a donc une avenue bien sûr, mais aussi une boulangerie où l’on sert la meilleure baguette tradition du département, la Colbert, élue Meilleure Baguette de Paris 2022 et servie au palais de l’Élysée, bref, Colbert, c’est une star à Sceaux !

© Nicolas Pelé – L’intérieur de l’Orangerie abrite notamment les sculptures originales des jardins de l’époque de Colbert, dont les copies représentant Hercule, Apollon, Castor et Pollux, les animaux du portail d’honneur… sont exposées un peu partout dans le domaine du château.
© Nicolas Pelé – L’Orangerie fit l’admiration des contemporains de Louis XIV, et impressionna particulièrement les ambassadeurs du monarque du royaume de Siam, l’actuelle Thaïlande.

Lorsqu’en 1690, le domaine passe dans les mains du duc du Maine, fils de Louis XIV et de Mme de Montespan, l’Orangerie accueille quelques-unes des Grandes nuits de Sceaux, ces bals masqués et soirées festives organisés par la duchesse du Maine. Plus tard, en 1733, l’Orangerie retrouve pour la première fois sa raison d’être : 210 orangers y sont plantés. A la Révolution, l’Orangerie devient une grange… Durant la guerre franco-prussienne de 1870-1871, un obus français détruit le tiers est de l’édifice (25 mètres tout de même), occupé par les Bavarois, tout comme le buffet de l’orgue de l’église Saint-Jean-Baptiste toute proche. Durant la Grande Guerre, elle devient une caserne militaire, puis sert d’entrepôts pour les machines agricoles en 1920… La restauration de l’édifice, menée par le Département des Hauts-de-Seine en 2014, rendit à l’Orangerie d’Hardouin-Mansart son lustre d’antan.

Le 4 décembre 1700, une grande réception fut donnée dans l’Orangerie par le duc du Maine lors des adieux de Louis XIV à son petit-fils le duc d’Anjou, avant son départ pour le trône d’Espagne. Il fut le premier Bourbon d’Espagne sous le nom de Philippe V. Le roi d’Espagne actuel est son descendant direct.
© Nicolas Pelé – Cette allée qui relie le kiosque du château à la façade ouest de l’Orangerie accueille régulièrement de superbes expositions de photos.
© Nicolas Pelé – Jardin sud de l’Orangerie...
© Nicolas Pelé – … où trône une splendide statue d’Hercule.
© Nicolas Pelé – treillage du jardin est de l’Orangerie : un autre style…
© Nicolas Pelé – … où il est très agréable de flâner.

Les anciennes écuries

© Nicolas Pelé – Datant du XVIIème siècle, l’égayoir où les chevaux prenaient leur bain est classé monument historique, avec ses murs entièrement appareillés en pierre, son fond pavé et sa rampe inclinée.

A droite de la grille d’honneur se dresse le pavillon de l’Intendance, qui était la résidence de l’intendant du domaine de Sceaux, ainsi que les anciennes écuries de Colbert, restaurées en 2006. C’est ici aussi que se garaient les carrosses. Elles abritent désormais la boutique du parc, une salle d’expositions temporaires et d’ateliers pédagogiques, les écuries des policiers du parc, et un restaurant gastronomique, Le Trévise, en hommage au duc de Trévise qui fit édifier le château actuel entre 1856 et 1862. Impossible de ne pas remarquer devant les écuries un étrange bassin, comme une piscine qu’on aurait vidée. Il s’agît d’un égayoir. Un quoi ? Ce mot n’est guère plus utilisé à notre époque, car il n’en existe plus beaucoup… On parle aussi de pédiluve. Ce grand abreuvoir du XVIIème siècle servait au bain des chevaux, bref, une sorte de piscine à chevaux !

© Nicolas Pelé – La grande baignoire des chevaux n’a pas changé depuis l’époque de Colbert. Il n’en reste plus beaucoup en France…
© Nicolas Pelé – La patrouille (brigade équestre) du parc de Sceaux monte de majestueux percherons.
© Nicolas Pelé – Le restaurant gastronomique Le Trévise a été récompensé par les titres de Maitre Restaurateur, Restaurant de Qualité du Collège Culinaire de France, du Bottin Gourmand et du Gault et Millau.

Le pavillon de l’Aurore, chef-d’œuvre du parc

En continuant encore un peu plus sur la droite, on arrive rapidement au pavillon de l’Aurore, à l’extrémité nord-est du parc de Sceaux, face au lycée Lakanal. Classé monument historique, c’est l’un des rares édifices de l’époque de Colbert qui soient parvenus jusqu’à nous. Edifié en 1671 dans le potager et le verger du domaine (qu’on projette de reconstituer dans les prochaines années), ce belvédère à l’italienne bâti au sommet d’une colline offrait une belle vue sur la campagne environnante. Ce bâtiment exceptionnel sert de bureau d’été à Colbert, qui y tient parfois le conseil des ministres. Il a été conçu par l’architecte Claude Perrault, le frère de Charles, l’auteur des célèbres contes. On lui doit notamment la façade de l’aile est du palais du Louvre, dite colonnade du Louvre, un des chefs-d’œuvre du classicisme français, ainsi que l’Observatoire de Paris et la chapelle du château de Sceaux (aujourd’hui disparue). L’adresse d’entrée du château de Sceaux est d’ailleurs le 8 avenue Claude-Perrault.

© Nicolas Pelé – Derrière, on reconnait le toit du lycée Lakanal. Pourquoi l’Aurore ? Tout simplement car il se trouve à l’est du parc, où l’on pouvait admirer l’aurore. A proximité, toujours à l’est du parc, se trouve l’entrée d’honneur, par où arrivait le soleil, mais aussi le Roi-Soleil, Louis XIV bien sûr !
© Nicolas Pelé – Façade ouest du pavillon de l’Aurore. Louis XIV s’y rendit en 1677.
© Nicolas Pelé – Maquette du pavillon de l’Aurore dans le musée du château. Il se compose d’une rotonde couronnée d’un dôme demi-circulaire.
© Nicolas Pelé – Le superbe plafond sous l’impressionnante coupole représentant le Char de l’Aurore, est un chef-d’œuvre ! Il a été décoré par Charles Le Brun, le grand peintre de Louis XIV, décorateur de la galerie des Glaces de Versailles.

Au plafond de la voûte du pavillon, Charles Le Brun, le peintre et décorateur de Louis XIV, a peint L’Aurore sur son char chassant la Nuit, chef-d’œuvre réalisé vers 1673. La figure de l’Aurore prend place sur son char, précédent celui du Soleil qui s’apprête à se lever. Le char de l’Aurore s’oppose à la Nuit qui lui fait face de l’autre côté de la composition. Elle est représentée avec son voile sombre d’où surgissent les Rêves, les monstres et autres créatures. De part et d’autre, on aperçoit sur leur cheval Castor et Pollux, entourés d’un cortège d’allégories illustrant les saisons, les 12 signes du zodiaque et les jours le long de la corniche. Levez la tête et amusez-vous à les repérer ! Cette peinture a également un sens politique. L’Aurore, symbolisant Colbert, prépare l’arrivée du Soleil, emblème du roi Louis XIV. La visite de ce pavillon est fortement recommandée, d’autant qu’un casque virtuel vous révèle tous les passionnants secrets de la peinture de Le Brun.

© Nicolas Pelé – Le superbe jardin de tulipes du pavillon de l’Aurore…
© Nicolas Pelé – … donne sur le majestueux lycée Lakanal.
© Nicolas Pelé – Sculpture de l’Aurore, devant le pavillon éponyme, comme ébloui par le soleil levant.
© Nicolas Pelé – Son acolyte le Crépuscule, regarde dans la direction opposée, le soleil couchant !

Le château de Sceaux

Le château de Colbert, édifié en 1673-1674 par Claude Perrault et décoré par Le Brun, n’existe plus malheureusement. Comme beaucoup de prestigieux monuments, il n’a pas survécu à la folie révolutionnaire… Devant vous se dresse l’édifice construit deux siècles plus tard, entre 1856 et 1862, par l’architecte Joseph-Michel Le Soufaché pour le duc de Trévise. Figurez-vous que c’est l’un des rares édifices du domaine qui n’est pas classé à l’inventaire des monuments historiques ! Trop récent peut-être… Le château de Sceaux accueille depuis 1937 les collections du musée de l’Île-de-France, renommé en 2013 musée du Domaine départemental de Sceaux, entièrement rénové en 2019. Valorisant l’art de vivre à la française, il retrace l’histoire du domaine et de ses illustres propriétaires, à travers une collection de peintures, sculptures, céramiques, mobilier et objets d’art. Autant de témoignages du grand goût français de Louis XIV à Napoléon III.

© Nicolas Pelé – Façade est, en arrivant depuis la grille d’honneur, où se trouve l’entrée du musée du Domaine départemental de Sceaux.
© Nicolas Pelé – Façade ouest, faisant face à la grande plaine de Châtenay. La symétrie est parfaite !
© Nicolas Pelé – Le château actuel, beaucoup plus petit que celui de Colbert (qui était flanqué de deux ailes et d’une chapelle), fut édifié sous le Second Empire entre 1856 et 1862 par l’architecte Joseph-Michel Le Soufaché pour le duc de Trévise. L’édifice en briques et pierres est coiffé de hautes toitures d’ardoise, dans un faux style Louis XIII, alors en vogue.
© Nicolas Pelé – Les parterres de broderies de buis et de gazon devant la façade ouest du château ont été restaurés en 2013, s’inspirant de ceux créés par Le Nôtre au XVIIème siècle.
© Nicolas Pelé – Une restauration particulièrement bien réussie, et un lieu prisé par les jeunes mariés pour leurs photographies.
© Nicolas Pelé – Le château se reflète dans le bassin de la terrasse des Pintades.

Un peu (beaucoup) d’histoire

Le château qui se dresse face à vous n’est hélas pas celui de Colbert, véritable mini Versailles, rasé pendant la Révolution, y compris la chapelle. Tout commence dans la 2ème moitié du XVème siècle, quand Jean Baillet, seigneur de Sceaux, fait construire une première maison qualifiée d’hôtel. En 1597, c’est le baron Louis Potier de Gesvres, seigneur de Bourg-la-Reine, du Plessis-Picquet (actuel Plessis-Robinson), et de Sceaux, qui fait construire un premier château. C’est ce même Louis Potier de Gesvres, au service des rois Henri III, Henri IV et Louis XIII, qui fit construire le château de Blérancourt, dans l’Aisne, qui abrite le musée d’histoire et d’art consacré à l’amitié franco-américaine.

© Nicolas Pelé – Le château de Blérancourt, dans l’Aisne, qui abrite le musée d’histoire et d’art consacré à l’amitié franco-américaine, avait le même propriétaire que le premier château de Sceaux : le baron Louis Potier de Gesvres.

C’est ce modeste manoir racheté par Colbert en 1670 qui deviendra le somptueux château de Sceaux, aujourd’hui disparu. En treize ans, jusqu’à sa mort en 1683, l’ex-poulain de Mazarin a fait de Sceaux, petite seigneurie, un domaine quasi princier. Il convoque les grands artistes de son temps (Jules Hardouin-Mansart, Le Brun et Le Nôtre), qui s’illustrèrent à Versailles, pour en faire un majestueux châteaux, mais pas trop non plus. Il sait ce que le faste du château de Vaux-le-Vicomte couta à son propriétaire Nicolas Fouquet. André Le Nôtre, le plus célèbre des jardiniers français, qui a déjà officié à Vaux-le-Vicomte et à Versailles, dessine les jardins, crée l’Octogone et les cascades. Le jardinier du Roi-Soleil s’amuse avec les dénivelés, façonne perspectives et dentelles végétales. Le fils aîné de Colbert, le marquis de Seignelay, agrandi considérablement le domaine, dont il double l’étendue vers l’ouest, faisant creuser le grand canal, toujours par Le Nôtre. L’occasion d’une deuxième visite de Louis XIV en 1685.

© Nicolas Pelé – Façade sud, sous le regard facétieux de l’allégorie de l’eau, légèrement vêtue…

Après la mort du marquis de Seignelay en 1690 (à seulement 39 ans), le domaine passe aux mains du duc du Maine, fils légitimé et préféré que Louis XIV a eu avec Madame de Montespan. Bref, le fils du Roi-Soleil succède au fils de Colbert ! C’est à ce moment qu’intervient un personnage passionnant : la belle-fille de Louis XIV, l’épouse du duc du Maine : Louise Bénédicte de Bourbon-Condé, la duchesse du Maine, petite-fille du Grand Condé. Elle réunit autour d’elle une cour littéraire avec les plus brillants esprits de son temps, dont Montesquieu, d’Alembert et Voltaire, qui ont tous une rue à Sceaux. Voltaire en a même deux, avec la rue Arouet. Sceaux est ainsi la seule commune de France à honorer François-Marie Arouet dit Voltaire de deux rues !

De somptueuses fêtes et des nuits costumées se déroulent dans le parc, le château, l’orangerie, la ménagerie, et même au pavillon de l’Aurore. Ce sont les fameuses « Grandes Nuits de Sceaux », pendant lesquelles, à la lumière des torches, les invités jouent des œuvres écrites dans la journée. Opéras, ballets, divertissements mimés étaient joués au milieu des grandes eaux, accompagnés de feux d’artifices. On s’amuse jusqu’au petit matin, c’est plus fun qu’à Versailles où l’on s’ennuie ferme à la cour de son beau-père, le Roi-Soleil déclinant (il meurt en 1715). C’est dans ce cadre festif qu’en 1747 Voltaire écrit en une journée Zadig, qu’il fait jouer dans le parc le soir même ! C’est ici également que le grand philosophe écrivit dans le même esprit Micromegas.

© Nicolas Pelé – Durant les « Grandes Nuits de Sceaux », on jouait à la lumière des torches des œuvres écrites dans la journée. Cette photo a été prise durant les célébrations nocturnes célébrant le 400ème anniversaire de la naissance de Colbert en 2019. 

Impliqués dans la conspiration de Cellamare qui visait à prendre le pouvoir au détriment du régent Philippe d’Orléans, neveu de Louis XIV, le duc et la duchesse du Maine sont arrêtés par les mousquetaires. Cela dit, on peut comprendre leur frustration, car le Roi-Soleil avait bien stipulé dans son testament que c’est le duc du Maine qui devait assurer la régence le temps de la majorité de Louis XV. Testament cassé par Philippe d’Orléans… Bien que rapidement graciés, ils doivent faire profil bas. Décidément, chez les Condé, le complotisme est une histoire de famille ! La duchesse du Maine a suivi le chemin de son grand-père le Grand Condé, l’un des principaux meneurs de la Fronde contre son cousin Louis XIV. C’est elle en effet qui joua un rôle de premier plan dans la conspiration, poussant son mari le duc du Maine, au faible caractère et moins motivé qu’elle… Une tradition bien ancrée dans l’histoire des rois de France : la trahison et les complots familiaux.

© Nicolas Pelé – Allégorie de la terre, statue en marbre du XVIIIème siècle, à l’entrée de l’allée de la Duchesse, qui relie le château aux Grandes Cascades.
© Nicolas Pelé – Les allégories de l’eau et de la terre gardent l’allée de la Duchesse ainsi que le kiosque où il fait bon prendre un verre par beau temps en admirant la vue.

A la mort de la duchesse du Maine en 1753, le château passe à ses fils, d’abord au prince de Dombes, qui n’a pas le temps d’en profiter puisqu’il meurt deux ans plus tard en 1755. Son frère le comte d’Eu est le nouveau proprio, et en profite durant 20 ans, jusqu’à sa mort en 1775. C’est son cousin, le duc de Penthièvre, neveu du duc du Maine, qui récupère l’héritage, mais il n’y séjourne guère… Lui aussi a droit à sa rue (où se trouve une grande résidence éponyme) à Sceaux, qui permet de rejoindre rapidement la gare RER depuis la rue Houdan piétonne et le jardin de la Ménagerie. C’est son bibliothécaire qui garde le château, les Scéens le connaissent bien, il s’agit du fabuliste Florian, dont le buste trône dans le jardin des Félibres. Les deux hommes sont toujours liés puisque la rue de Penthièvre se prolonge au sud de la rue Houdan par la rue Florian.

© Nicolas Pelé – Le château de Sceaux accueille depuis 1937 les collections du musée de l’Île-de-France.

Finalement, le château est confisqué à la Révolution et transformé en école d’agriculture… Un négociant, Jean-François Hippolyte Lecomte, l’achète en 1798. On se demande bien pourquoi, car il le rase en 1803 ! Comme si cela ne suffisait pas, il démantèle les cascades de Le Nôtre et laboure le parc… Ce monsieur, véritable fossoyeur du domaine (il ne risque pas d’avoir sa rue à Sceaux), avait en prime le culot de signer ses courriers « le comte de Sceaux », en référence à son nom de famille, alors qu’il n’était bien sûr pas du tout comte de Sceaux, qui n’a jamais été comté, mais seulement une châtellenie, puis une baronnie. Pendant plus d’un demi-siècle, il n’y a plus de château à Sceaux… C’est son gendre, le duc de Trévise, qui acquit le domaine en 1829. En clair, il hérite d’une exploitation agricole… Il édifie le château actuel entre 1856 et 1862, à l’emplacement de celui de Colbert. En toute modestie, son père Adolphe Édouard Casimir Joseph Mortier (vous remarquerez qu’à l’époque les gens avaient des noms à rallonge), le nomma Napoléon-César… Joseph Mortier (un prénom suffira bien) reçut son titre de duc de Trévise ainsi que son bâton de maréchal d’empire des mains de Napoléon Ier.

© Nicolas Pelé – Le musée du château valorise l’art de vivre à la française de Louis XIV à Napoléon III, à travers l’histoire du site et de ses anciens propriétaires.

Par une ironie assez cocasse, Napoléon-César Mortier, duc de Trévise et filleul de Napoléon Ier, avait épousé Anne-Marie Lecomte, la fille de celui-là même qui l’a fait détruire ! Le château a beaucoup souffert de la guerre de 1870, les troupes prussiennes s’étant installées dans le domaine. C’est pourtant un obus français et non allemand qui détruit cette année-là une partie de l’Orangerie et le buffet de l’orgue de l’église Saint-Jean-Baptiste de Sceaux. Le duc et la duchesse de Trévise meurent dans le château de Sceaux à une semaine d’intervalle cette même année, laissant le domaine à leur fils, le marquis de Trévise.

© Nicolas Pelé – Sur la porte d’entrée du musée, on aperçoit le monogramme NT, pour Napoléon Trévise, le duc qui a fait édifier le château actuel. Monogramme couronnant également la grille d’honneur à l’entrée du château.
© Nicolas Pelé – Le musée du Domaine départemental de Sceaux a été entièrement rénové en 2019.

La fin d’une époque, et le début d’une lente et inéluctable dégradation pour le parc et le château qui tombent progressivement à l’abandon. Il est occupé par les troupes bavaroises en 1870 et par l’armée française en 1914, qui en fait un parc à bestiaux… Depuis la mort du marquis de Trévise en 1892, le domaine appartient à sa fille, la princesse, accrochez-vous bien : Léonie de Cystria-Faucigny-Lucinge. Elle n’a que faire de sa nouvelle propriété et souhaite s’en débarrasser, s’apprêtant à vendre au plus offrant et à lotir les 227 hectares du parc ! A la demande du maire de Sceaux Jean-Baptiste Bergeret de Frouville, le département de la Seine l’achète pour 13 millions de francs à la famille Mortier en 1923 et le restaure. On peut dire que l’ancien maire de Sceaux est le sauveur du parc, qui aurait pu finir en quartier de barres d’immeubles ! Son buste trône dans le bosquet de Pomone, à deux pas du jardin des Félibres.

© Nicolas Pelé – Buste de Jean-Baptiste Bergeret de Frouville, le sauveur du parc de Sceaux.

Pour financer la restauration du domaine, le département de la Seine en lotit le tiers, donnant naissance au lotissement du parc caractérisé par ses nombreuses et spectaculaires maisons d’architectes, près de la station de RER Parc de Sceaux. Une autre partie du parc devait être lotie, entre les bosquets de cerisiers et le pavillon de Hanovre, projet heureusement abandonné ! On célèbre cette année 2023 le centenaire de cette acquisition inespérée qui sauva le parc de Sceaux.

© Nicolas Pelé – Statue équestre de Louis XIV dans la salle Colbert au musée du château, l’ancien salon de billard des Trévise. Il s’agît ici d’une reproduction de l’immense statue équestre qui trônait place Vendôme à Paris, détruite à la Révolution. Attention, il ne faut pas s’approcher, on marcherait sur le parquet marqueté d’une maison d’Asnières datant de 1890 !
© Nicolas Pelé – La salle Maine, ancienne salle à manger des Trévise, évoque la cour de Sceaux au temps du duc et de la duchesse du Maine. C’est la belle époque des Grandes Nuits de Sceaux.
© Nicolas Pelé – La superbe décoration à peintures du XVIIIème siècle de la maison de Mademoiselle Guimard, provenant de l’immeuble situé au 100 rue de Paris à Pantin (93) a été remontée ici, au premier étage du château de Sceaux. Elle est classée monument historique. Vous verrez dans la suite de l’article que le même procédé a été utilisé pour le pavillon de Hanovre, déplacé du boulevard des Italiens pour être remonté dans le parc de Sceaux.

Après les ravages de la guerre de 1870-1871 et la Première Guerre Mondiale, n’oublions pas la Seconde Guerre Mondiale : le domaine fut occupé par l’armée française en 1939, puis par les Allemands de 1940 à 1944, et pour finir dans la foulée par les Américains en 1945-1946. Finalement, grâce aux rénovation récentes, notamment la restauration de l’Orangerie, des Grandes Cascades, des jeux d’eau et du Grand Canal, la construction d’une passerelle et la réintroduction des parterres de broderie derrière le château, le domaine retrouve peu à peu son âge d’or du temps de Colbert. Un parc labellisé « jardin Remarquable » et Espace Végétal Ecologique », agrémenté d’aires de jeux, de kiosques gourmands et même d’un théâtre de Guignol. Depuis avril 2022, on peut faire des promenades en barques sur le Grand Canal, comme à l’époque de Colbert.

Les Grandes Nuits de Sceaux

Les fêtes et divertissements des Grandes Nuits de Sceaux furent donnés par la duchesse du Maine (la belle fille de Louis XIV si vous avez bien suivi), qui tint ici une cour brillante pendant près d’un demi-siècle, de 1705 à 1753, appelée la petite cour de Sceaux. Au programme, devinettes, charades, jeux littéraires, danses, musiques, opéras, pièces de théâtre, bals masqués… La duchesse elle-même était une excellente danseuse et musicienne hors pair, qui excellait au clavecin. Durant le carnaval, la fête battait son plein durant trois jours, du dimanche au mardi gras, montait crescendo et s’achevait en apothéose par un feu d’artifice. Il faut imaginer 700 carrosses garés devant le château, des milliers d’invités, tous déguisés et costumés en mode commedia dell’arte.

© Nicolas Pelé – Sculpture de feu lors des célébrations nocturnes célébrant le 400ème anniversaire de la naissance de Colbert en 2019, clin d’œil aux « Grandes Nuits de Sceaux »

Les nuits de Sceaux commençaient dès l’après-midi : la duchesse tenait salon avec les grands esprits de son temps. On tirait une lettre au hasard dans un pot. D ? On jouait aux devinettes, P ? Il fallait inventer un poème. C ? Une charade, etc… Pour manifester son pouvoir absolu sur la cour, la duchesse du Maine créa l’ordre de la Mouche à miel (une abeille), dont elle était la dictatrice perpétuelle. Sa devise ? « Elle est petite, mais fait de graves blessures ». En effet, la duchesse était très petite de taille, mais son caractère… Son emblème ? L’abeille bien sûr ! D’ailleurs, il y a toujours des ruches dans le parc de Sceaux et son miel est excellent ! Parmi les célèbres chevaliers de l’ordre de la Mouche à miel, on peut citer notamment Montesquieu et Voltaire, qui disait « On s’amuse autant à Sceaux qu’on s’ennuie à Versailles ». C’est à Sceaux, lors d’une journée passée chez la duchesse du Maine, que Voltaire eu l’idée d’écrire Zadig.

© Nicolas Pelé – Spectaculaire installation de feu pour célébrer le 400ème anniversaire de la naissance de Colbert en 2019. 

Le Petit Château : avant-goût du musée du Grand Siècle

© Nicolas Pelé – Façade du Petit Château, plus ancien édifice du parc de Sceaux.

Le Petit Château, qui abrita la bibliothèque municipale de 1948 jusqu’aux années 1960, est le plus ancien édifice de tout le parc, puisqu’il fut édifié en 1661, soit plus de dix ans avant que Colbert ne fasse l’acquisition du château de Sceaux. Il l’achète en 1682 (un an avant sa mort) pour en faire la résidence de ses invités. Une annexe plutôt sympa ! Plus tard, au XVIIIème siècle, la duchesse du Maine y loge ses enfants pour leur éducation. Situé rue du docteur Berger à deux pas de l’église Saint-Jean-Baptiste, le Petit Château accueille actuellement le Pavillon de préfiguration du musée du Grand Siècle jusqu’à fin 2025, en attendant l’ouverture prévue en 2026 de ce nouveau grand musée qui sera installé au sein de l’ancienne caserne Sully au domaine de Saint-Cloud.

© Nicolas Pelé – Le monumental portail d’accès au Petit Château, en pierre de taille, a été restauré en 2022. Encadré de pilastres et surmonté d’un fronton triangulaire, il constitue un accès prestigieux, classé à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques en 1931.
© Nicolas Pelé – Vue du petit jardin du Petit Chateau, depuis la salle du premier étage. On aperçoit au centre le petit bassin où trône « La Petite Olympe », statue fontaine évoquant l’automate hydraulique de l’époque de la duchesse du Maine. Petit Château, pavillon de l’Aurore, Orangerie : chaque édifice du domaine a son petit jardin au style très différent ! L’Orangerie en a même deux (jardin sud et jardin est).

La faïencerie

© Nicolas PeléEn face du Petit Château, rue des Imbergères, se dressent les bâtiments du XVIIIème siècle qui abritèrent l’ancienne manufacture de céramiques, fondée par la duchesse du Maine, encore elle ! On y fabriquait de la porcelaine tendre.

L’aile nord est la dernière partie qui subsiste de cet établissement, l’une des manufactures les plus importantes de France au XVIIIème siècle, avant de décliner jusqu’à sa fermeture en 1879. On peut admirer dans le musée du château de magnifiques céramiques provenant de cette faïencerie réputée pour sa faïence très fine dite japonnée, à l’émail d’un blanc laiteux. En effet, on ne pouvait pas y produire de la véritable porcelaine, privilège réservé à Sèvres par Madame de Pompadour !

© Nicolas Pelé – Belle collection de céramiques de la faïencerie de Sceaux, exposées dans le musée du Domaine départemental de Sceaux.
© Nicolas Pelé – Quel est cet étrange objet en céramique de la manufacture de Sceaux ? Une bourdaloue : un pot de chambre que les femmes utilisaient discrètement pour se soulager, à la messe par exemple, qui durait trois heures à l’époque… Il tient son nom du père jésuite Bourdaloue, dont les interminables sermons étaient redoutables pour la vessie des dévotes ! On l’utilisait aussi durant les longs trajets en carrosse, deux heures pour rallier Sceaux à Versailles, contre 20 minutes aujourd’hui…

Les perspectives de Le Nôtre

Rien ne vaut un plan pour comprendre les perspectives !

Il est temps de partir explorer ce parc immense, qui multiplie les effets de perspectives (deux est-ouest et deux nord-sud), avec ses plans d’eau, ses bassins, ses cascades et ses allées agrémentées de statues. Le tout sublimé par des alignements d’arbres qui nous font voyager : cèdres du Liban, cerisiers du Japon, peupliers d’Italie, aubépines de Virginie, noyers d’Amérique, sapins du Caucase, cyprès d’Arizona, pins d’Himalaya, pins sylvestres et maritimes…. Taillés en rideau, ils représentent un exemple parfait de ce qu’on appelle « les jardins à la française », œuvre du jardinier de Louis XIV, André Le Nôtre, réalisé au XVIIème siècle, et régulièrement rénové. Lui aussi a droit à sa grande avenue, qui longe toute la partie est du parc de Sceaux.

© Nicolas PeléLa principale perspective est-ouest, du château à la Coulée Verte en passant par la terrasse des Pintades et la plaine des Quatre Statues.

La première perspective est-ouest, dans l’axe du château, part de Bourg-La-Reine, passe par l’allée d’Honneur, traverse le château au sommet d’une colline, puis redescend vers l’ouest, se déployant par la plaine des Quatre Statues, en direction de Châtenay-Malabry, qu’elle atteint au niveau de la Coulée Verte (promenade des Vallons de la Bièvre). Cette immense plaine était hors des murs du domaine au temps de Colbert, butant sur un mur d’enceinte au niveau de l’actuelle terrasse des Pintades, qui surplombe le Grand Canal. Une partie de ce mur d’enceinte est toujours visible entre le Grand Canal et les Grandes Cascades.

© Nicolas PeléVue du château de Sceaux depuis la Coulée Verte, à l’extrémité ouest de la perspective, qui s’achève à l’est au portail d’honneur, où une licorne et un chien terrassent un dragon et un loup.
© Nicolas Pelé – La Coulée Verte (Promenade des Vallons de la Bièvre) ferme la grande perspective est-ouest qui passe par le château de Sceaux.
© Nicolas Pelé – Le résistant Paul Couderc est tombé ici, entre la Coulée Verte et l’entrée Sully du parc de Sceaux, tué par les Allemands le 22 août 1944. Il a sa rue, qui débute à quelques pas de cette plaque commémorative, longeant le parc en direction de la faïencerie et du Petit Château.

La seconde perspective de l’époque de Colbert est perpendiculaire à la première. Elle s’étend cette fois-ci dans un axe nord-sud, du château de Sceaux à Antony, en passant par l’allée de la Duchesse, puis la cascade descendant la colline vers le sud. Ses eaux jaillissantes se déversent dans plusieurs vasques jusqu’au bassin octogonal et son grand jet d’eau central, avant qu’une pelouse encadrée d’arbres ne remonte… pour redescendre jusqu’à la plaine de la Patte d’Oie, où les moutons tondent la pelouse… En élargissant la perspective, on peut dire qu’elle relie pratiquement la gare de Sceaux au nord jusqu’à la grille de l’actuelle gare RER Croix de Berny, au sud, à Antony. 

© Nicolas Pelé – La seconde perspective de l’époque de Colbert, cette fois-ci nord-sud, de Sceaux à Antony, passe par les Grandes Cascades et le bassin de l’Octogone. Elle est très proche de la deuxième perspective nord-sud, constituée par le Grand Canal, également créée par Le Nôtre, mais après la mort de Colbert, pour son fils le marquis de Seignelay. 
© Nicolas Pelé – Le même endroit avec un peu de recul, allée de la duchesse du Maine.

Le Grand Canal, plus d’un kilomètre de Sceaux à Antony

© Nicolas Pelé – Cette perspective nord-sud débute sur l’hémicycle de la terrasse des Pintades et s’étend tout le long du Grand Canal jusqu’à Antony. Bordé de peupliers d’Italie, le Grand Canal, alimenté par le ru d’Aulnay et le ru de Châtenay, s’étire sur plus d’un kilomètre de long ! Ensuite, les deux ruisseaux se joignent au ru des Morteaux puis se jettent dans la Bièvre, affluent de la Seine.
© Nicolas Pelé Point de vue à l’opposé, près de l’entrée où se trouve la piscine de la Grenouillère à Antony. Le Grand Canal du parc de Sceaux représente les deux tiers de celui de Versailles.

La deuxième perspective nord-sud, de Sceaux à Antony, est très proche de la première (constituée par les Grandes Cascades et le bassin de l’Octogone). Elle fut réalisée après la mort de Colbert, toujours par Le Nôtre, pour le fils du grand ministre de Louis XIV, le marquis de Seignelay, qui agrandit considérablement le domaine. Cette perspective part du Petit Château (et même l’église Saint-Jean-Baptiste et le Jardin de la Ménagerie en élargissant), passe par la terrasse des Pintades et sa fontaine, puis le Grand Canal de 1 140 mètres de long (autant que le Petit Canal de Versailles), jusqu’à la sous-préfecture d’Antony (et même l’hôpital privé d’Antony en prolongeant l’axe). Notez que la frontière entre les communes de Sceaux et d’Antony passe exactement au milieu du Grand Canal et du bassin de l’Octogone. On l’oublie souvent mais le parc de Sceaux n’est pas qu’à Sceaux ! Il se partage aussi avec la ville d’Antony, même si Sceaux bénéficie de la plus belle part : sur les 181 hectares, 121 sont sur la commune de Sceaux et 60 à Antony. Pour rappel, à son apogée du temps du marquis de Seignelay, le parc de Sceaux avait une superficie de 227 hectares.

© Nicolas Pelé – Barques de promenade sur le Grand Canal, bordé de peupliers d’Italie sur plus d’un kilomètre !
© Nicolas Pelé – On aperçoit au loin à gauche la flèche de l’église de Sceaux, qui jaillit derrière la terrasse des Pintades.
© Nicolas Pelé – Des barques sont en location depuis 2022 sur le Grand Canal. Une belle promenade à faire durant les beaux jours. Un juste retour d’une tradition de canotage dans les années 1930 à 1950.
© Nicolas Pelé – Début de la perspective, depuis l’hémicycle, en forme de croissant de lune, juste devant le Petit Château, passant par le bassin de la terrasse des Pintades. Au loin, le Grand Canal, et hélas, les grues qui gâchent un peu la vue au loin…

Les Grandes Cascades Art Déco des années 1930

Au départ du château, l’allée de la Duchesse (on parle de la duchesse du Maine vous l’aurez compris) mène tout droit aux Grandes Cascades créées par Le Nôtre pour Colbert, inaugurées par Louis XIV en personne, en 1677. Hélas, elles furent entièrement détruites à la Révolution. Celles que l’on admire actuellement furent réalisées par l’architecte Léon Azéma dans le style Art Déco, inaugurées en 1935 en présence du président de la République de l’époque Albert Lebrun. Emmanuel Macron n’est pas venu en 2021 pour la dernière rénovation…

© Nicolas Pelé – Spectacle de feu lors de l’inauguration en septembre 2021. Vu d’en bas, au niveau du bassin de l’Octogone.

Elles utilisent le relief accidenté du parc par un jeu de 17 terrasses et cascades (Azéma n’a pu qu’en refaire neuf lors de leur rénovation en 1935) sur 23 mètres de dénivelé. On remarque sept mascarons (cinq au centre et deux dans des niches sur le côté) réalisés par Auguste Rodin, pour les fontaines de l’ancien palais du Trocadéro, sur la colline de Chaillot, à l’occasion de l’Exposition Universelle de 1878. Ces grandes cascades conduisent directement au bassin de l’Octogone, entouré de grands platanes, d’où jaillit lors des grandes eaux un jet de 25 mètres de haut. On est loin des 140 mètres du jet d’eau de Genève au lac Léman, mais tout de même, le spectacle est superbe !

© Nicolas Pelé – Le jet d’eau du bassin de l’Octogone, par une belle journée d’hiver. Ce bassin de forme octogonale, comme son nom l’indique, est relié par un petit canal au Grand Canal. Il fut réalisé entre 1670 et 1675 à l’emplacement d’un marécage où se trouvait un étang, appelé « la Mer Morte ».
© Nicolas Pelé – Inaugurée en 2022, cette passerelle en bois de 22 mètres de long et 6 mètres de large traversant le Canal de Seignelay permet un sacré gain de temps, évitant tout le tour de l’Octogone. Ce n’est finalement qu’un juste retour aux origines car un « pont neuf » traversait le petit canal au même endroit, comme le montrent certaines gravures du XVIIème. Autre symbole, il relie Sceaux à Antony !
© Nicolas Pelé – Ces mascarons en fonte d’Auguste Rodin étaient initialement prévus pour orner les jardins du palais du Trocadéro. Ils ornent désormais la Fontaine de Jouvence des Grandes Cascades. Ici, le buffet d’eau est gelé. Leurs petits camarades également réalisés par Rodin pour la même expo se trouvent dans les serres d’Auteuil.
© Nicolas Pelé – Vu sous cet angle, on voit bien qu’ils soufflent !
© Nicolas Pelé – Ils ne soufflent pas de l’air, mais crachent de l’eau !
© Nicolas Pelé – De part et d’autre des cascades, une niche abrite un mascaron.
© Nicolas Pelé – Dans l’Antiquité, leurs visages grotesques servaient à éloigner le mal du bâtiment sur lequel ils étaient apposés. Ils sont par la suite devenus purement décoratifs.
© Nicolas Pelé _ Les Grandes Cascades vues d’en haut.
© Nicolas Pelé _ Les Grandes Cascades vues d’en bas.
© Nicolas Pelé _ Jeux d’eau et de feu lors de l’inauguration, accompagné de musique classique.

Le pavillon de Hanovre, téléporté de Paris à Sceaux

Conçu en 1759 par l’architecte Jean-Michel Chevotet, le pavillon de Hanovre ornait le jardin de l’hôtel particulier du maréchal de Richelieu (descendant du célèbre cardinal), situé à Paris, sur le boulevard des Italiens. Menacée de démolition, sa façade, classée « Monuments historiques », fut démontée pierre par pierre, puis remontée tel un puzzle dans son état d’origine entre 1931 et 1932 à la lisière ouest du parc de Sceaux, aux frontières des trois communes de Sceaux, Antony et Châtenay-Malabry. Léon Azéma, l’architecte des nouvelles cascades mais aussi de l’ossuaire de Douaumont à Verdun, est également à la manœuvre : c’est le point de naissance de trois nouvelles perspectives, dont la deuxième perspective est-ouest, passant par le bassin de l’Octogone, le Petit Canal (ou canal de Seignelay), la moitié du Grand Canal, la plaine de Chatenay et donc le pavillon de Hanovre, concluant en majesté cette perspective. En élargissant, on arrive vers l’ouest à l’église de Châtenay-Malabry, et vers l’est à la gare RER Parc de Sceaux.

© Nicolas Pelé – Façade est du pavillon de Hanovre terminant la deuxième perspective est-ouest, passant par le rond-point central du Grand Canal, la passerelle et l’Octogone.

Notez que sa façade, tournée vers le nord à Paris, est tournée vers l’est dans son nouvel écrin du parc de Sceaux. Bref, le pavillon de Hanovre a perdu le nord ! Alors que le département des Hauts-de-Seine a récemment restauré l’intérieur du château, l’Orangerie, les écuries, le portail du Petit Château, les parterres de broderies, le petit canal, le Grand Canal et les Grandes Cascades, il manque le petit dernier, le pavillon de Hanovre, qui pourrait retrouver une seconde jeunesse. Sans jeu de mots, après cette restauration, le pavillon devrait abriter un espace de restauration : un salon de thé. Un projet de réhabilitation est en cours, afin de faire la liaison avec l’éco quartier La Vallée qui prend forme dans son prolongement, avec déjà une rue de Hanovre et une résidence nommée domaine de Hanovre. Affaire à suivre donc…

Le pavillon de Hanovre au XIXème siècle, boulevard des Italiens à Paris, avant d’être « téléporté » au parc de Sceaux.
Pourquoi ce nom de Hanovre ? Le pavillon fut édifié grâce au butin de guerre ramené par les soldats français aux portes de Hanovre (capitale de la province éponyme du royaume de Prusse), lors de la guerre de Sept Ans (de 1756 à 1763). Considéré comme le véritable premier conflit mondial (des combats se déroulent en Amérique, en Europe et en Inde), il opposa la France, l’Autriche, la Pologne, la Suède et la Russie, à une coalition comprenant la Prusse et le Royaume-Uni. C’est lors de cette guerre que la France perdit le Canada au profit des Anglais…
© Nicolas Pelé – Le pavillon de Hanovre sous son blanc manteau d’hiver. Il faut s’imaginer cet édifice construit entre 1758 et 1760 trônant boulevard des Italiens à Paris, « téléporté » en 1933 à la lisière sud-ouest du parc de Sceaux ! Un procédé déjà utilisé ailleurs dans le domaine : la maison de Mademoiselle Guimard, dont la splendide décoration à peintures du XVIIIème siècle a quitté l’immeuble du 100 rue de Paris à Pantin, pour être remontée au premier étage du château de Sceaux.
© Nicolas Pelé – Le pavillon de Hanovre ferme la dernière perspective, qui relie sur cette photo le bassin de l’Octogone, le petit canal et sa passerelle, le Grand Canal et la plaine de Châtenay. Le grand jet d’eau cache un peu le pavillon de Hanovre, qui est dans l’axe, tout au fond !
© Nicolas Pelé – Allez, zoomons un peu, depuis la passerelle du petit canal, on aperçoit mieux le pavillon de Hanovre !

Le parc de Sceaux au fil des saisons

© Nicolas Pelé – Lever de soleil au parc de Sceaux.
© Nicolas Pelé – Au détour d’une allée, un mystérieux platane bloque le passage. On se demande bien ce qu’il fait là !
© Nicolas Pelé – Au milieu du parc, entre les Grandes Cascades et le Grand Canal, se cache l’ancien mur d’enceinte qui délimitait le domaine à l’époque de Colbert.
© Nicolas Pelé – Bassin des Lilas, caché entre la terrasse des Pintades et les Grandes Cascades. Il fut autrefois le réservoir du grand jet de l’Octogone.
© Nicolas Pelé – Un parcours sportif tapissé d’écorces de pin très agréable à la foulée fait le tour du parc sur 3,2 km, passant dans les sous-bois, l’occasion d’apercevoir des écureuils !
© Nicolas Pelé – Avec un peu de chance, on croise des écureuils roux.
© Nicolas Pelé – Petite halte sous un kiosque à pique-nique : l’abri du « bois des écureuils ». Il n’a pas usurpé son nom : situé non loin du bassin de l’Octogone, c’est l’un des spots du parc pour les observer, de préférence le matin.
© Nicolas Pelé – Et un autre abri bien camouflé.
© Nicolas Pelé – En cas de pluie, plusieurs refuges comme celui-ci, dans la plaine de la Patte d’Oie, permettent de s’abriter.
© Nicolas Pelé – Belle sculpture d’un cerf, d’une biche et d’un faon, sous la neige, au bord du bassin de l’Octogone. Encore une bonne idée de Léon Azéma, qui a été chercher cette œuvre d’art pour la mettre ici.
© Nicolas Pelé – Elle est accompagnée d’une autre sculpture similaire juste en face. Cette fois-ci, le cerf, la biche et le faon sont au repos.
© Nicolas Pelé – Toujours au bassin de l’Octogone, Castor et Pollux, du sculpteur Jean-Baptiste Tuby, à qui l’on doit la superbe sculpture en marbre représentant le baptême du Christ, par saint Jean-Baptiste, dans l’église Saint-Jean-Baptiste de Sceaux.
© Nicolas Pelé – L’allée des Cèdres sous la neige, un spectacle féerique de plus en plus rare avec le réchauffement climatique…
© Nicolas Pelé – Le même endroit au printemps. Il n’est pas rare d’apercevoir un écureuil traversant cette allée sur la canopée, de cèdre en cèdre.

Les cerisiers en fleurs et l' »hanami »

© Nicolas Pelé – La floraison des 154 cerisiers du Japon du bosquet nord en avril est un spectacle incontournable ! De nombreux Japonais viennent y célébrer leur fête traditionnelle, l' »Hanami », aux côtés des Scéens et des amoureux de la nature.
© Nicolas Pelé – Il faut venir le matin au lever du soleil pour éviter la foule qui déboule en journée : le spot évoque alors plus le festival des Vieilles Charrues…

Situés de part et d’autre de la plaine de Châtenay, les bosquets de cerisiers nord et sud sont réalisés lors du grand chantier de restauration du Domaine de Sceaux par l’architecte Léon Azéma, dans les années 1930. On lui doit déjà le pavillon de Hanovre et les Grandes Cascades Art Déco. Ces bosquets n’apparaissaient donc pas dans le dessin du jardin imaginé par André Le Nôtre. Le bosquet sud, constitué de 104 cerisiers aux grosses fleurs blanches (Prunus avium Plena), entre en résonnance avec le bosquet nord, planté de 154 cerisiers (Prunus serrulata Kanzan) quasi centenaires, donnant de magnifiques fleurs roses en avril. La floraison des 104 cerisiers est très attendue, mais très éphémère : elle ne dure qu’une dizaine de jours, il ne faut pas rater son coup, ni venir trop tôt, ni trop tard ! Cette floraison donne lieu à la fête « Hanami », littéralement « regarder les fleurs », qui attire beaucoup de monde, notamment de nombreux Japonais, adeptes de cette coutume ancestrale de leur pays. Inutile de guetter les cerises, ces arbres d’ornement ne donnent pas de fruits.

© Nicolas Pelé – Porte d’entrée de l’hanami ».
© Nicolas Pelé – Même le GR passe par ici ! On remarque le code couleur rouge et blanc sur le tronc…
© Nicolas Pelé – Ce socle en pierre pour lanterne japonaise est très photogénique au milieu des cerisieurs en fleurs.
© Nicolas Pelé – Il faut en profiter car son propriétaire, le Musée départemental Albert-Kahn à Boulogne-Billancourt, qui abrite un splendide jardin japonais, aimerait bien le récupérer…
© Nicolas Pelé – Une explosion de rose !
© Nicolas Pelé – Prunus serrulata Kanzan, cerisier japonais en fleurs.
© Nicolas Pelé – Le parc ouvre du lever au coucher du soleil : un conseil, venez au lever du soleil, quand la brume donne un aspect mystique aux lieux. L’occasion aussi d’admirer les cerisiers en fleurs sans la foule au moment de l’ »hanami » en avril !

Deux mémoriaux rendent hommage aux génocides juif et arménien

© Nicolas Pelé – Situé à proximité du pavillon de Hanovre, le mémorial de la déportation rend hommage aux Alto-séquanais (habitants des Haut-de-Seine pour ceux qui auraient un doute) de confession juive déportés et morts durant la Seconde Guerre Mondiale. Il se trouve plaine de la Sibérie, bien nommée par une belle journée hivernal !
© Nicolas Pelé – L’Aigle d’Arménie, mémorial en hommage aux victimes du génocide arménien.
© Nicolas Pelé – Le théâtre de Guignol, à deux pas de l’Aigle de l’Arménie : on y accède depuis l’entrée du parc située avenue du Général-de-Gaulle à Antony.

Le marché aux bestiaux de Sceaux, ancêtre de Rungis et des Halles

© Nicolas Pelé – Enclos des vaches dans la plaine de l’ex-pépinière.
© Nicolas Pelé – Un air de campagne sur la plaine de la Patte d’Oie où broutent les moutons.

Un clin d’œil à l’histoire car au XVIIème siècle, Sceaux abritait l’unique marché aux bestiaux d’Ile-de-France, lancé par Colbert, encore lui ! En effet, il fit carrément fermer son concurrent de Poissy… qui rouvrit peu après la mort de Colbert. Durant l’âge d’or au temps de Colbert, les bouchers de Paris étaient obligés de se fournir auprès du marché de Sceaux, qui avait le monopole de la vente de bœufs et de moutons dans un rayon de 80 kilomètres autour de la capitale ! Le marché aux bestiaux de Sceaux, qui alimenta Paris en viande pendant près de deux siècles, disparu en 1867, laissant la place aux abattoirs dans la grande halle de la Villette à Paris.

Le Jardin de la Ménagerie : le petit parc de Sceaux

A deux pas du parc de Sceaux, jouxtant l’ancienne mairie, le jardin de la Ménagerie (anciennement jardin de Sceaux), fut longtemps surnommé le petit parc de Sceaux. C’est l’ancienne ménagerie de la duchesse du Maine, qui y a laissé deux colonnes, tombes de ses serins (oiseau de la famille des passereaux) ainsi que l’urne où est enterré son chat préféré. L’histoire du Jardin de la Ménagerie, réalisé par la duchesse du Maine entre 1720 et 1722, est intimement liée à celle du Parc de Sceaux, car pendant deux siècles, les deux sites font partie d’un seul et même domaine. C’est ici que se terminait la ligne de Sceaux historique (de 1846 à 1891) et que se tenait le célèbre bal de Sceaux de 1799 à 1896, dont Balzac tira sa nouvelle Le Bal de Sceaux, paru en 1830 (le plus ancien texte de La Comédie humaine).

© Nicolas Pelé – Urne contenant les cendres de Mar-la-Main, le chat préféré de la duchesse du Maine, dans le jardin de la Ménagerie. C’est le sommet d’un triangle équilatéral formé avec les deux colonnes contenant les cendres de ses oiseaux.
© Nicolas Pelé – Le roi des animaux ici n’est par un lion, mais le chat préféré de la duchesse du Maine, Mar-la-Main (comprendre « Morlamain »), et un jeu de mots avec Maine (la duchesse du).
© Nicolas Pelé – Colonne funéraire au milieu du jardin de la Ménagerie de Sceaux, pierre tombale d’un des deux serins de la duchesse du Maine. La butte au centre est tout ce qu’il reste de son pavillon.
© Nicolas Pelé – C’est sur ce petit tertre engazonné doté de quatre emmarchements en pierre que se tenait le joli pavillon de forme ronde de la duchesse du Maine, rasé à la Révolution. Edifié à l’emplacement de l’ancien moulin du temps de Colbert, l’édifice était notamment utilisé comme observatoire astronomique. Le 22 mai 1724, ses invités assistèrent depuis cette rotonde à une éclipse totale de soleil, prélude à une nuit de festivités mémorable.
Voici à quoi ressemblait l’élégant pavillon de la Ménagerie de la duchesse du Maine, où toutes les pièces étaient rondes, à l’emplacement du petit tertre du jardin de la Ménagerie.

Pour rejoindre le jardin de la Ménagerie depuis le parc de Sceaux, il suffit juste de passer devant l’église Saint-Jean-Baptiste puis traverser la rue Houdan, autrefois appelée le grand chemin de Versailles. En effet, en regardant sur une carte, elle y mène tout droit ! Et en continuant dans la même direction vers l’ouest, on arrive à Houdan, dernière ville d’Île-de-France avant la Normandie, qui approvisionnait le marché aux bestiaux de Sceaux. La rue Houdan est la première rue piétonne d’Ile-de-France, dès 1974. Difficile de s’imaginer que cette charmante rue piétonne était autrefois une route départementale très passante !

A l’époque, les commerçants étaient contre la piétonisation de la rue Houdan
Pour finir, découvrons ce superbe domaine vue du ciel !

Informations pratiques

L’une des 18 grilles d’entrée du parc.

Publié par Nicolas Pelé

Le voyage est la passion de ma vie : chaque départ est une aventure, peu importe la destination, et chaque fois que je prends l'avion, c'est comme la première fois.

4 commentaires sur « A la découverte du parc de Sceaux sur les traces de Colbert, Le Nôtre et la duchesse du Maine »

  1. Superbe article vraiment très dense. On s imprégné bien de l histoire de parc de sceaux, de son histoire…du vécu.merci pour ce très belle article.

    Aimé par 1 personne

  2. Bonjour, Nicolas ,
    Encore et encore un article parfait sur le parc de sceaux,
    tout est bien clair, (diversifie), dans les petits details , et generalise en appui des belles photos , les gens ,la nature les animaux , ce que m’a donne envie de visiter , et vivre chaque instant dans l’endroit convenable , GRAND MERCI encore .

    Aimé par 1 personne

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